A
Après avoir longtemps vogué sur la mer Pacifique, nous aperçûmes de loin une île de sucre avec des montagnes de compote, des rochers de sucre candi et de caramel, et des rivières de sirop qui coulaient dans la campagne. Les habitants, qui étaient fort friands, léchaient tous les chemins, et suçaient leurs doigts après les avoir trempés dans les fleuves. Il y avait aussi des forêts de réglisse, et de grands arbres d’où tombaient des gaufres que le vent emportait dans la bouche des voyageurs, si peu qu’elle fût ouverte.
Fénelon
Voyage dans l’île des plaisirs
abricot
On trouve à Isfahân [Ispahân] des fruits en grande abondance. Parmi ceux-ci on remarque des abricots qui n’ont pas leur pareil, et que l’on appelle du nom de kamar eddîn; les habitants les font sécher et les conservent ; on en rompt le noyau, qui renferme une amande douce*.
Ibn Battûta
Voyages, I, De l’Afrique du Nord à La Mecque
* Appelés aussi tokhm shama (graine de soleil) et décrits par les voyageurs occidentaux (Chardin, Tavernier). Ibn Battûta indique plus tôt dans l’ouvrage : « Dans Hamâh, il y a beaucoup de fruits, parmi lesquels celui appelé abricot à amande ; car, lorsqu’on casse son noyau, on trouve à l’intérieur une amande douce. » [Hamâh : sultanat indépendant sous la suzeraineté d’Égypte gouverné par une branche de la famille ayyubide dont le représentant à l’époque était Abu’l Feda (1310-1331), le célèbre historien et géographe.] Ce qui est confirmé par Dimashqi (env. 1300) : « Ce lieu a beaucoup de fruits et spécialement l’abricot appelé kâfuri (camphré), qui ne se trouve nulle part ailleurs. »
Les abricots, sont plus agreables à l’estomac que les Pesches, & ne se corrompent pas si facilement dans le ventre. Les confits fortifient l’estomach, & resserrent.
A. Porchon
Les Regles de la santé….
Les premiers fruits qui se présentent à confire, sont les Abricots verds, on les prend pour cela, avant que le bois du noyau commence à durcir ; & qu’une épingle puisse y entrer par la queuë sans résistance ; il s’en confit avec leur peau, & d’autres parés, qui en paroissent plus beaux & plus clairs.
Joseph Gilliers
Le Cannaméliste français
Le jour que Henri IV entra dans Paris, il fut voir sa tante de Montpensier, et lui demanda des confitures. “ Je crois, lui dit-elle, que vous faites cela pour vous moquer de moi. Vous pensez que nous n’en avons plus. — Non, répondit-il, c’est que j’ai faim. ” Elle fit apporter un pot d’abricots, et en prenant elle en vouloit faire l’essai ; il l’arrêta, et lui dit : “ Ma tante, vous n’y pensez pas. — Comment ! reprit-elle, n’en ai-je pas fait assez pour vous être suspecte ? — Vous ne me l’êtes point, ma tante. Ah ! répliqua-t-elle, il faut être votre servante. ” Et effectivement elle le servit depuis avec beaucoup d’affection.
Tallemant des Réaux
Historiettes
Coll. A. P.-R.
Coll. A. P.-R.
Coll. A. P.-R.
Je n’hésitais […] pas à prendre un abricot confit tout verni de sucre, et je commençais la dégustation, lorsque j’entendis claquer une porte, puis une voix épaisse et sourde gronda, puis une voix de femme qui parlait très vite, puis ces deux voix à la fois, puis une autre porte, puis je n’entendis plus qu’un murmure, et je retrouvai dans ma bouche le goût de l’abricot.
Marcel Pagnol,
Le temps des amours
C’est de bon augure pour le petit programme que Solange s’est concocté au petit déjeuner entre la biscotte à la confiture d’abricots, dont elle a cuit quelques pots la semaine passée, et la biscotte au miel d’acacia.
Noëlle Châtelet,
La dame en bleu
acidulé,-e
Un minuscule poney galopait sur le rebord en velours rouge de la piste portant la pancarte Entracte sur le dos. Le public se levait, circulait, visitait les coulisses. Les palefreniers, portant l’uniforme bleu pâle à boutons de cuivre, démontaient les barres fixes, hissaient les trapèzes, rangeaient les cibles, les appareils, les tables des jongleurs, des tireurs, des illusionnistes. Les marchandes de pastilles de menthe, de caramels mous et de bonbons acidulés psalmodiaient ; les enfants faisaient des culbutes sur le tapis-brosse, les Auguste servaient des limonades, […].
Jean Cocteau
Portraits-souvenir
(article publié dansLe Figaro)
Certes, Mme Tim n’était pour rien dans cette beauté-là. Mais la beauté qui nous attendait à Saint-Baudille et qui, celle-là, était son œuvre, avait la même qualité de bonbon anglais, acidulée, fraîche, multicolore, torsadée de citron, de vinaigre et d’azur. Un peppermint à vous donner des reins de cerf.
Jean Giono
Un roi sans divertissement
Butant contre le bas de son fardeau, il évite de trop s’approcher des machines à débiter des confiseries, se suffisant de percevoir le bruit sec qu’elles font quand elles ont rejeté le paquet de chewing-gum ou de caramels ou de bonbons acidulés ou de nougat, etc., qui lui devient familier comme mille autres sons et bruits dont il faudra faire, plus tard, l’inventaire.
Rachid Boudjedra
Topographie idéale pour une agression caractérisée
affriander
[…] tel montrait un chien savant, tel un âne sauteur, tel un singe gambadant et grimaçant, pour affriander les badauds autour d’un étal de bimbeloterie ou de mercerie, ou de sucrerie ; le bon public se laissait prendre à ces amorces, qui réussissaient toujours, quoique plus vieilles que le Pont-Neuf.
Paul Jacob
Contes littéraires du bibliophile Jacob à ses petits-enfants
J’entre dans une pâtisserie où des dames absorbent des éclairs au chocolat et des babas au rhum. Elles semblent prendre le plus grand plaisir à cette collation. L’une d’elles, fixant sa voisine d’un air affriandé, lui demande : — Ça goûte ?
L’autre répond : — oui, beaucoup.
Adolphe Retté
Au pays des lys noirs, Souvenirs de jeunesse et d’âge mûr
Affriander. Accoutumer aux friandises. Évitons d’affriander les enfants ; ne leur donnons pas trop de bonbons. Gardons-les pour nous.
Robert-Robertet Gaston Derys
Dictionnaire de Gastronomie Joviale
Coll. A. P.-R.
agent de change
D’un fauteuil affaissé elle retira des illustrés concaves, un bas à remmailler, une boîte de réglisses dits agents de change.
Colette
Gigi
Elle ajouta “ Ouvre la bouche et ferme les yeux ! ” et lui posa sur la langue des pastilles Agents de Change.
Robert Sabatier
Trois sucettes à la menthe
Au moment de payer, Marguerite fit ajouter une boîte métallique à couvercle coulissant contenant ces pâtes de réglisse Bonnet appelées Agents de Change.
Robert Sabatier
Trois sucettes à la menthe
Coll. A. P.-R.
aguignette
On composerait un petit jardin zoologique avec les formes des craquelins de Rouen, les fameuses haguignettes. La plastique pâtissière, cubiste avant la lettre, simplifie autant qu’elle varie le profil de ses bêtes. Elle marque une préférence pour les bois de cerf (haguignettes du Vexin normand, feuilletés de Fontainebleau) […].
Maurice Vloberg
Les Noëls de France
Chanson de quête normande
Aguignette rose,
Aguignettes, ma marraine,
Donner mé quèque chose,
Donner mé du pain d’la crème,
Si vous m’donner rien,
Si vous vouler rien m’donner
J’coupe la queue à vot’chien.
Quat’fourchettes dans vot’gosier.
Aguignettes ma marraine,
Aguignettes, aguignettes,
Les rats ont maqué mon bonnet,
Coupé-mé un petit cagnon,
Il y a plus de six semaines,
Si vous n’vouler pas l’couper,
Qu’je couche avec mon capé !
Bailler-mé l’pain tout entier!
Aguignollé ! Aguignolet !
Aguignettes ma marraine,
Aguignettes, aguignettes,
J’vous ai vu par la verreine [fenêtre],
J’ai des miettes dans ma pouquette,
Vous faisier un biau gateau,
Pour donner à vos poulettes,
Donner m’en un petit morceau !
Pour qu’elles pondent de gros œufs,
Aguignolo ! La maîtresse donnait m’en deux.
Aguignoleu !
alberge
[…] les alberges confites sont bien préférables à ces détestables pruneaux dont tout le monde félicite la Touraine.
Honoré de Balzac
Les deux amis
allumette
Ils passèrent dans le laboratoire. Sur les tables, de grands plateaux noirs présentaient de minces rectangles de pâte qu’un mitron enduisait de sucre liquide avec un pinceau. Le pâtissier indiqua que c’étaient des allumettes. À la cuisson, elles allaient gonfler et se pailleter.
Robert Sabatier
Les noisettes sauvages
amande
Les amandes à la rose fournissent le sirop de la vie ; cette friandise adoucit à la fois l’esprit et le corps.
Mir Haçan
poète hindoustani de Delhi, fin du XVIIIe siècle
Les clercs partis, Mme Coquenard se leva et tira d’un buffet un morceau de fromage, des confitures de coings et un gâteau qu’elle avait fait elle-même avec des amandes et du miel.
Alexandre Dumas
Les Trois Mousquetaires
Les dragées surtout, qu’il [Lantier] appelait des “ amandes sucrées”, lui mettaient une petite mousse aux lèvres tant elles lui chatouillaient la gargamelle.
Émile Zola
L’Assommoir
Sa chambre et son cabinet de toilette ne désemplissaient pas. Nous y étions toujours fourrés. […] nous allions toujours, l’un ou l’autre, piller qui un savon, qui de l’eau de Cologne, qui de son excellente pâte d’amandes. Bien souvent un gourmand y pilait dans un verre des amandes et du sucre et se confectionnait là sans façon une boisson délicieuse.
Vicomtesse de Simard de Pitray
Ma chère Maman
— Et puis, continua Marcelle, nous ne prenons pas de voiture, c’est si amusant de rentrer à pied, quand il est très tard !… Ce soir, comme nous sommes riches, nous remonterons un gâteau aux amandesde vingt sous… Fête complète, noce à tout casser !
Emile Zola
L’Argent
Des marchands avaient installé des tables contre le mur de l’église. C’était une invitation qui arrêtait les hommes, les filles et les enfants, les retenait devant les étalages avec des regards de convoitise. Il y avait là sur des nappes à carreaux rouges et blancs, des bocaux de pains aux amandes, de boules en sucre, de gimblettes et de macarons. […] Des pains d’épices s’amoncelaient, avec leurs croûtes vernies au blanc d’œuf. Et sur les assiettes séchaient des tartes de pruneaux, saupoudrées de sucre et de poussière.
Camille Lemonnier
Un Mâle
[…] des framboises que M. Swann avait apportées exprès, des cerises, les premières qui vinssent du cerisier du jardin après deux ans qu’il n’en donnait plus, du fromage à la crème que j’aimais bien autrefois, un gâteau aux amandes parce qu’elle l’avait commandé la veille, une brioche parce que c’était notre tour de l’offrir.
Marcel Proust
Du côté de chez Swann
Coll. A. P.-R.
Aussitôt que Violette eut reçu tous ces présents, elle monta dans sa chambre, et se mit à faire une pâte de sucre et d’amandes, en l’arrosant d’eau de rose et de jasmin. Puis, comme un potier ou un sculpteur, elle pétrit cette pâte avec sa truelle d’argent, et en moula le plus beau petit jeune homme qu’on ait jamais vu.
Édouard Laboulaye
Nouveaux contes bleus
[…] dans les buffets de gare les machines automatiques illuminées de différentes couleurs, crachant des cigares, des confiseries, des amandes sucrées.
Boris Pasternak
Essai d’autobiographie
Entre les arbres du grand parc, des tapisseries de la Savonnerie sont étendues et des pâtes d’amandes servies aux bosquets.
Jean Teulé
Le Montespan
amandine
“ Il a été gavé de sucreries ! ” dit-elle. Et l’on accusa la dame Cornu qui passait tout son temps à préparer des gâteaux roulés, des savoureux et des amandines dont elle refusait de communiquer les recettes en disant : “ Que voulez-vous ! Chacun a ses petites spécialités… ”.
Robert Sabatier
Trois sucettes à la menthe
Affiche de Duzolle, vers 1900.
amer
Vous rappelez-vous Claudine, qui aimait s’accroupir devant le feu en faisant tourner une épingle à chapeau juste assez vite pour éviter que le petit morceau de chocolat qu’elle faisait rôtir ne gouttât ? Quelquefois, elle la faisait tourner au-dessus d’une bougie. Mais les chandelles donnent un goût de suif qui nuirait à la saveur du chocolat brûlé, si propre, si âpre, si chaude. Ce serait comme de boire un Martini dans une timbale d’argent.
Le chocolat dur et amer est le meilleur, coupé en morceaux pas plus gros qu’un raisin sec bien dodu.La forme importe peu, car si vous êtes assez droit, vous le ferez rouler tout brûlant sur votre épingle et il sera aussi joliment façonnéqu’un grain d’opium.
Quand il est bien rond, bien boursouflé et qu’il dégage une odeur bleu foncé, il est à point. Alors, si vous ne soufflez pas à vous époumoner, vous vous brûlerez la langue. Mais c’est un régal.
Mary Frances Kennedy Fisher
Le fantôme de Brillat-Savarin, « À la frontière »
ananas
Découpi, coll. A. P.-R.
[…] Le roi n’a dans son potager aucun fruit exotique, mais il a de bon fruit du pays. Je n’ai jamais vu d’ananas crus, je n’en ai vu que des confits.
Princesse Palatine
Lettre à la duchesse de Hanovre, 28 décembre 1704
Elle savait la vie, depuis celle qui commence au fromage de Brie jusqu’à celle qui suce dédaigneusement des beignets d’ananas; depuis celle qui se cuisine et se savonne au coin de la cheminée d’une mansarde avec un fourneau de terre, jusqu’ici celle qui convoque le ban et l’arrière-ban des chefs à grosse panse et des gâte-sauces effrontés.
Honoré de Balzac
Une fille d’Ève, « Scènes de la vie privée »
— Et là-bas, ces gros fruits dorés à cône, dont le feuillage ressemble à une panoplie de sabres sauvages, on appelle ça des ananas, c’est la pomme de reinette des tropiques.
Henry Murger
Scènes de la vie de bohème
À côté de ces œuvres sérieuses venaient des œuvres plus légères, de petits biscuits soufflés à l’ananas, des fondants aux fraises, primeur alors fort rare ; des gelées d’orange servies dans l’écorce entière de ces fruits, artistement vidés à cet effet […].
Eugène Sue
Le Juif errant
Carte postale ancienne, coll. A. P.-R.
Chacun reçut un cadeau somptueux, et par-dessus le marché il y avait des kilos de sucreries inconnues : du loukoum, un ananas confit, tant d’autres merveilles que seule pouvait fournir, à ce que pensaient les enfants, la splendeur qu’était Londres. Paul tira gloire de ces friandises auprès de ses amis.
» — Un véritable ananas, coupé en tranches, et transformé en cristal. C’est épatant !
» Tous étaient fous de bonheur.
D. H. Lawrence
Amants et Fils
Je déchirais l’ananas suivant les règles, en l’inondant de kirsch, de sucre, puis de marasquin.
Léon Daudet
Salons et Journaux
Après un succulent repas — œuf Mornay, ris de veau, glace à l’ananas —, comme à l’accoutumée on se dirigea vers le salon où les bonnes avaient séparé les parties d’une table gigogne.
Robert Sabatier
Trois sucettes à la menthe
angélique
[…] puis se tenait au second étage un donjon en gâteau de Savoie, entouré de menues fortifications en angélique, amandes, raisins secs, quartiers d’oranges […].
Gustave Flaubert
Madame Bovary
Aussitôt Casse-Noisette frappa entre ses deux mains, et plusieurs bergers et bergères, chasseurs et chasseresses sortirent de la forêt, si délicats et si blancs, qu’ils semblaient de sucre raffiné. Ils apportaient un charmant fauteuil de chocolat incrusté d’angélique, sur lequel ils disposèrent un coussin de jujube, et invitèrent fort poliment Marie à s’y asseoir.
Alexandre Dumas
Histoire d’un casse-noisette
Ayez au chaud, sous un cosy ou sur un réchaud, une douzaine de fines brioches au vrai beurre fin, un compotier empli de bâtons d’angélique confite de Niort (bâtons de dix centimètres assez épais mais pas trop, transparents, bien givrés), plus une bouteille de crème d’angélique, exquise liqueur trop peu connue, une carafe d’eau frappée et une boîte de cigarettes Ferezli de Perse, ou ambrées du Caire.
» Allumez une cigarette, buvez une gorgée d’eau glacée, croquez un morceau d’angélique avec une bouchée de brioche quasi brûlante ; ensuite humez, aspirez et distillez dans votre bouche quelques gouttes de la liqueur charmante que suivra une gorgée d’eau et une goulée de blond et odorant tabac.
Comte Austin de Croze
La psychologie de la table, cité par Curnonsky et Gaston Derys, Anthologie de la Gastronomie Française, 1936.
L'angélique de Niort
Un jour — je ne puis m’exprimer plus précisément, car la place de ce jour dans l’ordre des temps est perdue et ne se retrouvera jamais — un jour, dis-je, revenant de la promenade avec Mélanie, ma vieille bonne, j’entrai, comme de coutume, et j’y sentis une odeur que je ne sus point reconnaître et qui venait, comme je l’ai appris depuis, de la fumée de charbon, une odeur non point âcre et suffocante, mais ténue, sournoise, écœurante, et qui toutefois ne m’importunait guère, car, pour l’odorat, j’étais alors plus semblable au petit chien Caire qu’à M. Robert de Montesquiou, le poète des parfums. Or, en même temps que cette odeur inconnue ou plutôt méconnue de moi chatouillait mes narines inhabiles, ma chère maman, après m’avoir demandé si j’avais été bien sage à la promenade, me mit dans la main une sorte de tige d’un vert émeraude, de la longueur d’une lame de couteau à dessert, mais beaucoup plus épaisse ; toute étincelante de sucre, et qui m’apparut comme une merveilleuse friandise, empreinte des charmes de l’inconnu : je n’avais encore rien vu d’approchant.
— Goûte, me dit ma mère, c’est très bon.
Coll. A. P.-R.
C’était très bon, en effet. Cette tige, quand on y mordait, se rompait en fibres sucrées d’un goût vraiment agréable et plus fin que tout ce que j’avais goûté alors de confiseries et de sucreries.
Et cette plante d’une telle douceur me fit songer aux fruits de la contrée où coulent des ruisseaux de sirop de groseilles à travers des rochers de caramel, bien qu’à vrai dire je crusse aussi peu au pays de Cocagne que Virgile aux Champs élyséens, admirés des Grecs,
Quamvis elysios miretur Græcia campos ;
mais je me plaisais, comme Virgile, à des fictions enchanteresses, et mon esprit s’émerveillait, ignorant le traitement que les confiseurs font subir à un pied d’angélique pour le rendre plaisant au palais. Car ce bâton d’émeraude tant délectable n’était autre chose qu’un morceau d’angélique offert à ma chère maman par Mme Caumont qui en avait reçu de Niort toute une caisse.
Anatole France
Le Petit Pierre
anis
Anis fleury, mon bel anis !
Il est bon dedans la maison
Quand il est cueilly de saison.
De bonne heure s’en faut garnir.
Cris de Paris, 1545
— Ma foi ! pour la gourmandise, je crois qu’il [l’Innocent] est plus qu’aux trois quarts éveillé… Voyez-vous le finaud ! il a flairé qu’il y avait quelque chose pour lui là-dedans… Une belle galette à l’anis que la grand-maman Renaud a fait exprès pour son Innocent.
Alphonse Daudet
L’Arlésienne
Les pains saupoudrés d’anis alternaient avec les gros fromages plus lourds que des disques, et les cratères pleins de vin, et les canthares pleins d’eau auprès des corbeilles en filigrane d’or qui contenaient des fleurs.
Gustave Flaubert
Salammbô
— Mère, quelle est cette femme ?
— Une lady qui va te donner un gâteau, mon mignon, répliqua mistress Fanoche.
Et elle ouvrit un sac de velours vert et en retira une petite galette à l’anis qu’elle tendit à l’enfant.
Peut-être celui-ci avait-il bien faim ; mais il refusa avec une dignité qu’on n’eût point soupçonnée cher un enfant de son âge.
Pierre Alexis de Ponson du Terrail
Les misères de Londres, « La nourrisseuse d’enfants »
Ces fêtes des Rois mages pendant lesquelles je mangeais tant de dragées fourrées d’écorce d’orange, tant de bonbons à l’anis m’ont laissé un arrière-goût délicieux.
Guillaume Apollinaire
Le Poète assassiné
Mon père […] partit, avec pour tout bagage, une sacoche de berger, un palmier nain dont il avait fait l’acquisition la veille, une faucille neuve et un sac en toile, avec une fermeture à coulisse. Ma mère l’avait confectionné dans un morceau de haïk de coton et l’avait bourré de provisions : olives noires, figues sèches, farine grillée et sucrée, deux pains parfumés à l’anis et dix qarchalas. Nous appelons ainsi des petits pains ronds sucrés, parfumés à l’anis et à la fleur d’oranger et décorés de grains de sésame.
Ahmed Sefrioui
La boîte à merveilles
J’avais apporté des nougats de toute sorte et des boîtes de pastilles rondes à l’anis de l’abbaye d’Ozerain. Je connais bien l’abbaye Saint-Pierre-de-Flavigny à Ozerain […].
Pascal Quignard
Le salon du Wurtemberg
Là-dessus, Jeannette apparaît avec un excellent chocolat, chaud, moiré, parfumé, et de succulentes grillades à l’anis, qui font rire Tartarin-Sancho en étouffant les cris de Tartarin-Quichotte.
Alphonse Daudet
Tartarin de Tarascon
Coll. A. P.-R.
anneau
Marie Mors, devant des gâteaux, tombait dans une sorte de délire assez proche de celui qui saisit la plupart des femmes au spectacle de bancs chargés d’étoffes à vendre. Assaillie dès le premier abord par un grand étalage de brimborions où voisinaient, entre des assiettes de crème fouettée décorée au moule d’un cygne ou d’une lyre, des anneaux bruxellois et d’autres au chocolat ou à la gelée avec encore des alouettes de Leipzig et de petits biscotins au gingembre, elle perdait tout de suite contenance.
André Pieyre de Mandiargues
Soleil des Loups
anniversaire (gâteau d')
— … et vous arrivez après le spectacle, ma sœur a déjà soufflé les chandelles, je veux dire les bougies du gâteau d’anniversaire ; vous ne saurez même pas combien il y en avait !
Jean-Louis Curtis
La Parade
apothicaire
Coll. A. P.-R.
Les Apothicaires font aussi candir certains médicamens en les faisant bouillir dans le sucre, & les conservent par ce moyen en nature : c’est à proprement parler ce qu’on appelle confire ; car ces deux opérations ne different entr’elles que du plus au moins de cuisson du sucre.
Diderot et D’Alembert
Encyclopédie
Cependant nous sortons de l’infirmerie ; M De Lagaraye nous conduit au logement de l’apothicaire, qu’il nous présente comme un homme distingué par son mérite et son instruction ; on trouve-là une pharmacie complète et disposée, comme tout le reste, avec ordre et même élégance […].
Mmede Genlis
Adèle et Théodore ou Lettres sur l’éducation…
Le sucre est entré dans le monde par l’officine des apothicaires : il devait y jouer un grand rôle ; car, pour désigner quelqu’un à qui il aurait manqué quelque chose essentielle, on disait : C’est comme un apothicaire sans sucre.
Brillat-Savarin
Physiologie du Goût, Méditation vi
Le bon apothicaire doit vivre dans la crainte de Dieu ; être charitable, pieux, humain, affable, disposé à rendre service ; d’un caractère facile, libéral avec les pauvres, loyal, toujours prêt à pôrter secours aux malades en danger. Il ne doit être ni charlatan, ni cupide, ni buveur, ni dissolu.
Gazzoni
Piazza universale
apple pie
[…] se levant toutes les cinq minutes et se frayant un chemin jusqu’au bar pour en rapporter des assiettées de sandwiches, des paquets de pommes chips, des saucisses, […] des portions d’apple pie et des pintes de bière brune qu’il engloutissait d’un trait. »
Georges Perec
La Vie mode d’emploi
assiette / assiettée
Ce déjeuner, d’une frugalité monastique, se composait d’un petit turbot accompagné d’une sauce blanche, de pommes de terre, d’une salade et de quatre assiettées de fruits : des pêches, du raisin, des fraises et des amandes fraîches […].
Honoré de Balzac
L’envers de l’histoire contemporaine
Le soir, Mouret voulut que la table fût desservie de bonne heure. Il avait sorti une bouteille de vin cuit et fait acheter une assiettée de petits gâteaux.
Émile Zola
La Conquête de Plassans
[…] le domestique servait le thé. Il sortait, rentrait de nouveau, posait sur le guéridon le service de Chine, puis des assiettes de sandwichs et de biscuits.
Émile Zola
Au bonheur des dames
Les ennemis se trouvaient représentés par quelques assiettesde petits fours et des tasses à thé qui jonchèrent bientôt le sol. »
Alphonse Allais
À se tordre, Histoires chatnoiresques, « Tenue de fantaisie »
La table était convenablement servie, sans argenterie véritable bien entendu. Près de sa chaise se trouvait un grand dressoir qui supportait une quantité de carafes et de bouteilles, et quatre assiettes de fruits pour le dessert.
Charles Dickens
Les Grandes Espérances
Vraiment, vous ne vous laissez pas tenter ? ajoutait Mme Swann et tout en tendant une assiette de gâteaux : Vous savez que ce n’est pas mauvais du tout, ces petites saletés-là. ça ne paye pas de mine, mais goûtez-en, vous m’en direz des nouvelles.
Marcel Proust
À l’ombre des jeunes filles en fleurs
[…] il l’accueillit avec satisfaction, me conduisit vers le Prince et me présenta à lui d’un air friand, cérémonieux et vulgaire, comme s’il lui avait passé, en les lui recommandant, une assiette de petits fours.
Marcel Proust
Sodome et Gomorrhe
Un lustre manquait ; les candélabres, dont les bougies très hautes s’éméchaient à peine, faisaient un jour pâle et jaune au-dessus des compotiers, des assiettes montées, des jattes, où les fruits, les petits fours, les confitures, alternaient symétriquement.
Émile Zola
Nana
Les assiettes à gâteaux d'antan
Mais quelquefois au lieu d’aller dans une ferme, nous montions jusqu’au haut de la falaise, et une fois arrivés et assis sur l’herbe, nous défaisions notre paquet de sandwiches et de gâteaux. Mes amies préféraient les sandwiches et s’étonnaient de me voir manger seulement un gâteau au chocolat gothiquement historié de sucre ou une tarte à l’abricot. C’est qu’avec les sandwiches au chester et à la salade, nourriture ignorante et nouvelle, je n’avais rien à dire. Mais les gâteaux étaient instruits, les tartes étaient bavardes. Il y avait dans les premiers des fadeurs de crème et dans les secondes des fraîcheurs de fruits qui en savaient long sur Combray, sur Gilberte, non seulement la Gilberte de Combray, mais celle de Paris aux goûters de qui je les avais trouvés. Ils me rappelaient ces assiettes à petits fours, des Mille et une Nuits, qui distrayaient tant de leurs “ sujets ” ma tante Léonie quand Françoise lui apportait, un jour, Aladin ou la Lampe Merveilleuse, un autre, Ali-Baba, le dormeur éveillé ou Simbad le Marin embarquant à Bassora avec toutes ses richesses. J’aurais bien voulu les revoir, mais ma grand’mère ne savait pas ce qu’elles étaient devenues et croyait d’ailleurs que c’était de vulgaires assiettes achetées dans ce pays ? N’importe, dans le gris et champenois Combray, leurs vignettes s’encastraient multicolores, comme dans la noire église les vitraux aux mouvantes pierreries, comme dans le crépuscule de ma chambre les projections de la lanterne magique, comme devant la vue de la gare et du chemin de fer départemental les boutons d’or des Indes et les lilas de Perse, comme la collection de vieux Chine de ma grand’tante dans sa sombre demeure de vieille dame de province.
Marcel Proust
À l’ombre des jeunes filles en fleurs
aveline
aveline, est une espèce de noisette fort grosse, qui est la meilleure & la plus estimée ; elle croît dans le Lyonnois & dans l’Espagne, sur un noisetier qui forme l’arbrisseau […] ; elle sert dans l’Office à plusieurs usages, soit dans des biscuits, macarons, ou dragéers.
Joseph Gilliers
Le Cannaméliste français
Aujourd’hui on trouve cet arbre dans quelques-unes de nos provinces méridionales, et même en certaines parties de l’Angleterre ; mais c’est en Espagne, sur le revers méridional des Pyrénées, qu’il fournit en plus grande abondance ses meilleurs produits. Aussi les trois quarts au moins des avelines consommées en Europe viennent-elles de l’Espagne ; elles sont expédiées principalement de Tarragone et de Barcelone.
Magasin Pittoresque, 27, juillet 1852
Un commerce d’avelines au XIXe siècle
« — Je suis à la Halle, se dit Birotteau, faisons l’affaire des noisettes.
Après une heure de recherches, Birotteau, renvoyé des dames de la Halle à la rue des Lombards, où se consommaient les noisettes pour les dragées, apprit par ses amis les Matifat que le fruit sec n'était tenu en gros que par une certaine Mme Angélique Madou, demeurant rue Perrin-Gasselin, seule maison où se trouvassent la véritable aveline de Provence et la vraie noisette blanche des Alpes.
La rue Perrin-Gasselin est un des sentiers du labyrinthe carrément enfermé par le quai, la rue Saint-Denis, la rue de la Ferronnerie et la rue de la Monnaie, et qui est comme les entrailles de la ville .
Il y grouille un nombre infini de marchandises hétérogènes et mêlées, puantes et coquettes, le hareng et la mousseline, la soie et les miels, les beurres et les tulles, surtout beaucoup de petits commerces dont ne se doute pas plus Paris que la plupart des hommes ne se doutent de ce qui se cuit dans leur pancréas, et qui avaient alors pour sangsue un certain Bidault dit Gigonnet, escompteur , demeurant rue Greneta.
Ici, d'anciennes écuries sont habitées par des tonnes d'huile, les remises contiennent des myriades de bas de coton.
Là se tient le gros des denrées vendues en détail aux halles.
Mme Madou, ancienne revendeuse de marée, jetée il y a dix ans dans le fruit sec par une liaison avec l'ancien propriétaire de son fonds, et qui avait longtemps alimenté les commérages de la Halle, était une beauté virile et provocante, alors disparue dans un excessif embonpoint.
Elle habitait le rez-de-chaussée d'une maison jaune en ruines, mais maintenue à chaque étage par des croix en fer. Le défunt avait réussi à se défaire de ses concurrents et à convertir son commerce en monopole ; malgré quelques légers défauts d'éducation, son héritière pouvait donc le continuer de routine, allant et venant dans ses magasins qui occupaient des remises, des écuries et d'anciens ateliers où elle combattait les insectes avec succès.
Sans comptoir, ni caisse, ni livres, car elle ne savait ni lire, ni écrire, elle répondait par des coups de poing à une lettre, en la regardant comme une insulte.
Au demeurant bonne femme, haute en couleur, ayant sur la tête un foulard par-dessus son bonnet, se conciliant par son verbe d'ophicléide l'estime des charretiers qui lui apportaient ses marchandises et avec lesquels ses castilles finissaient par une bouteille de petit blanc.
Elle ne pouvait avoir aucune difficulté avec les cultivateurs qui lui expédiaient ses fruits, ils correspondaient avec de l'argent comptant, seule manière de s'entendre entre eux et la mère Madou les allait voir pendant la belle saison. »
Honoré de Balzac,
azerole
Tout noté sur le cahier vert, depuis ces chansons de pays, ces proverbes et locutions où l’instinct d’un peuple se confesse, jusqu’aux cris des vendeuses d’eau fraîche, des marchands de berlingots et d’azeroles de nos fêtes foraines […].
Alphonse Daudet
« Les Francs-tireurs », Souvenir d’un homme de lettres
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